De nouveaux systèmes politiques et juridiques

Malgré le ressentiment des populations locales vis-à-vis des anciens communistes, ceux-ci sont pratiquement tous restés à la tête des nouveaux gouvernements car, ayant par le passé monopolisé les places à l’Université et les postes de direction dans les firmes ou dans l’Administration, ils étaient les plus aptes à diriger leur pays [3]. Il s’agit cependant de communistes « reconvertis », tel par exemple l’actuel président polonais A. Kwasniewski, apparaissant le plus souvent sous l’étiquette sociale-démocrate et dont la politique est contrainte par les exigences du FMI ou de la Banque mondiale. Rassurant la communauté internationale, ils ont écarté tout retour au communisme ou même tout système mixte et opté pour la démocratie et le libéralisme.

Les nouveaux systèmes politiques et juridiques ont fait table rase du passé, comme l’illustrent les propos de l’historien totalitariste F. Furet [4] : « Rien de positif ni d’utilisable ne semble subsister du communisme : pas une idée, pas une institution, pas une loi, pas un code » [5]. F. Fukuyama, un conseiller du Pentagone, avance même la thèse hégélienne de la « Fin de l’histoire », résultat de la disparition des antagonismes Est-Ouest et de la victoire du modèle occidental. Cependant, J. Kornai dénonce cette confiance dans les vertus d’un système unique, l’ultralibéralisme, qui n’a fait que bénéficier d’un « K.O. technique » du communisme [6].

En pratique, un environnement juridique en conformité avec les recommandations de l’Union européenne est construit dans chaque pays autour de nouvelles constitutions qui prônent l’adoption du principe de séparation des pouvoirs et le respect des libertés publiques et économiques. Par exemple, la constitution polonaise promulguée le 25 mai 1997 à la suite d’un référendum s’oriente à la fois vers l’engagement de l’Etat dans le social et vers la conformité à Maastricht. Dans l’ensemble des PECO, le même esprit est décliné au niveau des lois, qui visent à permettre la mise en œuvre de l’économie de marché. Officiellement, ces mesures libérales sont le fruit de la volonté de nations autonomes qui renouent avec une tradition d’esprit d’entreprise antérieure au communisme. En réalité, les mesures libérales sont imposées par le FMI lorsque celui-ci accorde des prêts, ou appliquées par ces pays afin de remplir certaines conditions sine qua non pour leur entrée dans l’Union européenne.

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[3] Les populations ont parfois confié la charge de l’Etat à des non-communistes, comme à l’ancien président de Solidarnosc L. Walesa en Pologne ou à l’ancien dissident tchécoslovaque V. Havel en République tchèque.

[4] L’historiographie du communisme distingue les totalitaristes, qui considèrent que tous les régimes totalitaires (communistes, fascistes, nazis…) sont comparables car fondés sur une idéologie exclusive, et les révisionnistes, qui privilégient une approche plus historique et moins englobante des régimes.

[5] in G. Duchene, R. Tartarin (sous la dir. de), La grande transition, économie de l’après-communisme, Editions Cujas 1991, p. 9.

[6] L’économiste hongrois met notamment en garde contre l’effet pendulaire de balancier qui transforme une situation marquée par un Etat trop présent en une nouvelle, tout autant excessive, où l’Etat s’efface devant les forces du marché.

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